Mes recettes

Sous cette catégorie, je compte partager de minuscules réflexes quotidiens afin de compléter la pratique présentée dans mon livre

 

gopixpic.com
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Lors des débuts de cours, voici deux activités qui s’avèrent très intéressantes et stimulantes :

  • Au moment de retrouvailles, par exemple, tout le monde est debout, en cercle bien sûr, comme nous en avons l’habitude. Sur une musique calme (ex. Loreena Mc Kennitt, The Bonny Swans. Si c’est trop long, je décide à un moment donné de diminuer doucement l’émission jusqu’à l’éteindre tout à fait), nous nous lançons un ballon selon deux consignes qui permettent la rencontre et l’empathie. Je regarde la personne à qui je vais envoyer la balle pour qu’elle se prépare. Ensuite, j’effectue mon lancer en me mettant à sa place, de façon à ce qu’elle puisse vraiment recevoir le ballon. Pour ce faire, j’ai acheté une balle très pratique qui se gonfle comme un ballon de baudruche, très légère, douce et molle. La réception peut donc se faire en douceur et le jeu se dérouler dans une classe sans occasionner de dégâts.
  • Le jeu suivant est le jeu avec les paumes que l’on peut réaliser sur « Bill Haley &The Comets, Rock around the clock». On se choisit par deux et on frappe une fois avec la main droite sur la main droite de son vis-à-vis, on claque une fois dans ses mains, on frappe sur la main gauche de son vis-à-vis, puis on claque dans ses mains, et enfin, on frappe sur les deux mains de son vis-à-vis et de nouveau dans ses deux mains. L’animateur crie très régulièrement « Changez ! » pour que d’autres couples se forment. L’avantage de cette formule, c’est qu’elle est rapide, ce qui fait que l’on se tourne instinctivement vers des personnes vers lesquelles on ne serait pas nécessairement allé autrement. Peu à peu, le courant passe entre tous les participants qui se détendent ensemble. L’essentiel n’est pas de réussir l’ « exploit » mais de participer et d’échanger des regards et des rires.

 

Edgar Morin : aider à apprendre à vivre

tempsreel.nouvelobs.com
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Edgar Morin, La Voie Pour l’avenir de l’humanité, Fayard, 2011, p152-153

La réforme de l’éducation doit partir de la parole de l’Émile de Jean-Jacques Rousseau où l’éducateur dit de son élève : « Je veux lui apprendre à vivre ». Vivre s’apprend par ses propres expériences, avec l’aide d’autrui, notamment parents et éducateurs, mais aussi les livres, la poésie. Vivre, c’est vivre en tant qu’individu affrontant les problèmes de sa vie personnelle, c’est vivre en tant que citoyen de sa nation, c’est vivre aussi dans son appartenance à l’humain. Bien sûr, l’étude de la littérature, de l’histoire, des mathématiques, des sciences contribue à l’insertion dans la vie sociale, et les enseignements spécialisés sont nécessaires à la vie professionnelle. Mais, avec la marginalisation de la philosophie et de la littérature, il manque de plus en plus dans l’éducation la possibilité d’affronter les problèmes fondamentaux et globaux de l’individu, du citoyen, de l’être humain. Ces problèmes nécessitent, pour être considérés, la possibilité de réunir nombre de connaissances séparées en disciplines. Ils appellent une façon plus complexe de connaître, une façon plus complexe de penser. Et c’est cela que voudrait apporter la réforme. Tant que nous ne relions pas les connaissances selon les principes de la connaissance complexe, nous restons incapables de connaître le tissu commun des choses : nous ne voyons que les fils séparés d’une tapisserie. Identifier les fils individuellement ne permet jamais de connaître le dessin d’ensemble de la tapisserie.

Du coup, l’enseignement qui part de disciplines séparées au lieu de s’en nourrir pour traiter les grands problèmes casse par là même les curiosités naturelles qui sont celles de toute conscience juvénile qui s’ouvre : Qu’est-ce que la connaissance pertinente ? Qu’est-ce que l’homme ? la vie ? la société ? le monde ?

Un nouveau système d’éducation, fondé sur la reliance, radicalement différent donc de l’actuel, devrait s’y substituer. Ce système permettrait de favoriser les capacités de l’esprit à penser les problèmes individuels et collectifs dans leur complexité. Il sensibiliserait à l’ambiguïté, aux ambivalences, et enseignerait à associer des termes antagonistes pour saisir une complexité.

Et les valeurs, bordel !

Entre l’école des savoirs et l’école des valeurs, j’opte résolument pour la deuxième, même si le propos mériterait d’être nuancé. Parmi les nombreux arguments à faire valoir, je ne peux qu’inviter chacun de nous à se poser les questions suivantes : qu’avons-nous réellement retenu des apprentissages dispensés à l’école en termes de savoirs proprement-dits ?  Comment avons-nous appris et intégré pour notre vie les connaissances qui nous sont nécessaires et dont nous nous servons aujourd’hui ?

S’il n’a pas pratiqué les mathématiques dans son travail, qui peut dire, hormis les passionnés, qu’il se souvient de ses cours ? S’il n’a pas voyagé, rencontré des étrangers, visionné des films ou lu des ouvrages, qui peut dire qu’il parle correctement la langue étudiée à l’école ? Qui pourra se targuer un jour de connaître par cœur les articles de lois que certains philosophes voudraient enseigner ? À l’inverse, combien parmi nous ont-ils appris une langue étrangère sur le tas, par besoin ou par plaisir ? Ou encore, combien parmi nous ont-ils le sentiment d’avoir décuplé leurs connaissances grâce à leur pratique professionnelle ou leurs passions ?

Face à ces observations, qui me paraissent sans appel pour démontrer que l’école ne peut pas être avant tout un lieu de transmission des savoirs, je conviens qu’il est important de s’interroger alors sur ce qu’elle nous a réellement légué. Là aussi, une « introspection » s’avère nécessaire, car les réponses positives peuvent s’avérer précieuses lorsqu’il s’agit de réinventer l’enseignement. Il n’est pas question, en effet, de « jeter le bébé avec l’eau du bain ». Pour cette raison, j’aimerais beaucoup que l’exercice soit pratiqué non seulement par nous tous, mais aussi par nos ministres, nos créateurs de programmes pédagogiques, ou encore nos professeurs d’agrégation. Sans doute serions-nous obligés de revenir à l’essentiel ?

Et l’essentiel, parlons-en ! Les savoirs intellectuels, mis aujourd’hui à la portée d’un simple clic sur internet, n’ont jamais empêché quiconque de nuire ou de perpétrer des actes barbares. Dans ce monde où l’individualisme et la compétition sont poussés à outrance, l’intelligence mentale ne rend pas heureux, et elle devient trop souvent un outil pour réussir à tout prix, c’est-à-dire même au détriment des autres. Où pouvons-nous nous interroger sur le sens de notre vie, de nos actions ? Où pouvons-nous encore apprendre à vivre harmonieusement ensemble, à faire de nos différences des richesses, à découvrir que nos performances se démultiplient lorsque nous associons nos forces, que nos joies sont plus intenses lorsque nous sommes tous heureux et non lorsque nous faisons partie d’un petit groupe de chanceux ? L’école ne pourrait-elle devenir ce lieu béni ? Un lieu d’expériences où l’on apprend en vivant, parce qu’on ne retient vraiment que ce que l’on a expérimenté…

Recettes

paulchacra.com
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Sous cette catégorie, je compte partager de minuscules réflexes quotidiens afin de compléter la pratique présentée dans mon livre.

Lorsque j’invite mes élèves à un tête à tête avec eux-mêmes pour créer ou réfléchir, j’habille l’environnement de musiques calmes qui invitent à la sérénité. Il s’agit souvent de musiques classiques. Par ce biais, je leur permets en même temps d’ouvrir leurs oreilles à un univers parfois tout à fait nouveau, qui leur devient accessible et qu’ils aiment.

Lorsque mes élèves sont appelés à réaliser des observations ou travaux en groupes, je m’arrange pour qu’ils se retrouvent chaque fois avec des personnes différentes, afin que des liens se créent avec chaque copain de classe. Comme ils comprennent mes raisons, les jeunes s’avèrent très vite d’accord avec ma manière de procéder, même s’ils doivent au départ affronter un petit inconfort, rapidement dépassé. Pour ce faire, je m’assure du nombre de groupes nécessaires et j’attribue à chaque jeune un numéro issu de ce nombre. Tous ceux qui ont reçu le même numéro se retrouvent ensemble. (Ouh, qu’il est difficile d’expliquer cette chose si simple dans la pratique ! En tournant dans le cercle formé par mes élèves, je les désigne tour à tour et leur donne un numéro : par exemple, un, deux, trois, quatre, cinq, un deux, trois, quatre, cinq, etc.).